LEPAGE 1843

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LE DÉPARTEMENT DE LA MEURTHE

Statistique historique et administrative

par HENRI LEPAGE

NANCY 1843

(les abréviations ont été supprimées)

AMANCE (AMANTIUM CASTRUM, ASMANTIA, ESMENTIA, EMENTIA),

Petit bourg, autrefois ville de l’ancien duché de Lorraine, sur la crête d’une montagne haute d’environ 200 mètres, d’où la vue embrasse une magnifique étendue de pays, et au pied de laquelle coule le ruisseau de l’Amezule (Asmantiola), à 13 kilomètres N.-E. de Nancy, chef-lieu de l’arrondissement et du canton. Population: 549 hab., 55 électeurs censitaires, 12 conseillers municipaux, 145 feux. Nombre d’enfants: 103 en hiver, 46 en été. Surface territoriale : 442 hectares en terres labourables, 148 en prés, 65 en vignes, 450 en bois. L’hectare de terre semé en blé peut rapporter 12 hectolitres et 1/2, en orge 12, en seigle 15, en avoine 17 ; planté en vignes 66. L’élévation du sol de cette commune est peu favorable à l’éducation des bestiaux; on s’y livre principalement à la culture de la vigne. Il y a une huilerie, une tuilerie et un four à chaux; quelques habitants font de l’eau-de-vie commune. Censes : Lafourasse, Fleure-Fontaine (anciennement Flore-Fontaine ou Tillon), et le Jard. Lettres par Nancy.

Ancienne population : 1710, 83 habitants, 19 garçons; 1779, environ 130 feux ; 1802, 519 habitants, avec un bureau d’enregistrement; 1822, 485 habitants, 130 feux.

Anciennes divisions. En 1594, Amance était le chef-lieu d’une prévôté et châtellenie dépendant du bailliage de Nancy. Cette prévôté comprenait 51 villages. Léopold la supprima, le 13 août 1721, à cause de la proximité et du mélange des villages qui en dépendaient, et de ceux de la prévôté de Château-Salins; son but était aussi de réduire la multiplicité des officiers, qui était à charge à ses sujets. En 1746, le 17 janvier, la prévôté d’Amance qui avait été incorporée à celle de Château-Salins, fut rétablie, puis supprimée définitivement en 1751, époque où ce bourg fut compris dans le bailliage de Nancy, maîtrise et généralité de cette ville. Enfin, en 1789, il devint le chef-lieu d’un canton du district de Nancy. Amance était régi par la coutume de Lorraine.

Voici quelques-unes des prérogatives que possédait le prévôt d’Amance, dont l’office était domanial et affermé annuellement, Il avait le droit d’y créer un lieutenant et deux sergents; de mettre, à chacune des portes, un portier qui lui portait tous les soirs les clés de la ville, C’était lui qui prélevait, à son profit, l’impôt sur les quilles et autres jeux. Il pouvait prendre, au village de Champenoux, un bichet de blé, par an, mesure de Nancy; mettre un lieutenant à Mazerules, un sergent au clos de Salonne; ses attributions judiciaires ne s’étendaient qu’aux personnes non nobles; etc., etc.

Quant au spirituel, Amance était, dans l’origine, annexe de Dommartin, doyenné du Port, diocèse de Toul. L’évêque Pibon l’érigea en cure en 1150, parce que, dit-il, les habitants avaient été de tout temps durs et féroces, en sorte qu’aucun archidiacre ni doyen n’osait entrer dans leur ville pour les réduire au devoir. Plus tard la cure d’Amance fut détachée du diocèse de Toul et enclavée dans l’évêché de Nancy, dont elle faisait partie en 1778.

Si l’origine d’Amance ne remonte pas jusqu’à l’époque de la domination romaine dans nos contrées, si rien ne prouve, d’une manière tout à fait certaine, que la crête de la montagne sur laquelle elle est bâtie servit de camp aux légions de César, en revanche, cette localité doit être rangée parmi les plus intéressantes du moyen-âge. Son existence est plus ancienne que celle de  Nancy; Mercator l’appelle antiqua Lotharingiae cancellaria (ancienne chancellerie de Lorraine), et sa situation, aussi bien que son château, défendu qu’il était par cinq fortes tours, la rendaient une des places les plus importantes du duché. Il parait, d’après les documents authentiques, que les comtes de Lunéville, dont l’un porte le nom de Folmar, furent les premiers seigneurs d’Amance, et qu’ils transmirent cette terre aux comtes de Bar, on ignore de quelle manière. En 1157, Etienne de Bar, évêque de Metz, se qualifie de dominus et advocatus Amantiœ, et reconnaît que Frédéric, comte d’Amance, son frère, a, par le conseil des nobles, des hommes libres et des bourgeois d’Amance, donné à Udalric, abbé de Saint-Mihiel, le prieuré de Notre-Dame, bâti sous Amance (Laître). Des comtes de Bar, cette seigneurie passa aux ducs de Lorraine, par le mariage d’Agnès, fille du comte Thibaut Ier, avec le duc Ferri Il (vers 1207), avec réserve toutefois d’une des portes d’Amance, et de l’hommage des ducs de Lorraine.

Le 25 juin 1218, Thibault Ier, duc de Lorraine, devenu possesseur d’Amance par la cession que lui eu avait faite sa mère ayant attiré contre lui les armes de l’empereur Frédéric, ligué avec Blanche, comtesse de Champagne, fut assiégé dans Amance, fait prisonnier et détenu dans la tour qui prit son nom, où il signa un traité onéreux. Mais, une fois libre, Thibault ne songea nullement à remplir les conditions de ce traité, qui ne lui avait été arraché que par la force; alors l’empereur, usant d’adresse, l’attira à Würtzbourg, où il le retint quelque temps captif, et ne lui rendit la liberté que pour le faire empoisonner par une courtisane. C’est à ce fait que se rattache un des principaux épisodes de notre histoire. Pendant que Thibault était prisonnier près du roi des Romains, les seigneurs de Lorraine, à la tête desquels était Philippe de Gerbéviller et Hugues, comte de Lunéville, tentèrent de le déposséder de la souveraineté ducale. Mais la fidélité de Lambirin d’Ourches et l’annonce du retour du prince empêchèrent cette trahison de s’accomplir.

Nos historiens ne sont pas d’accord sur cet événement : les uns prétendent que le duc de Lorraine s’abaissa jusqu’a implorer, à genoux et sans armes, la pitié de son ennemi; les autres qu’il se défendit vaillamment et ne consentit à accepter que des conditions honorables.

Néanmoins la place fut prise d’assaut, la garnison passée au fil de l’épée, et le duc ne sortit de la tour d’Amance (Amans) , où il était gardé à vue, que quand, dit Errard dans ses Mémoires, « il eut dit et promis que se regarderoit tenir en tant que vassal li dit Amance de la comtesse de Champagne. »

En 1234, le château d’Amance était tenu en fief-lige par Gauthier de Vignori, époux d’Alix, fille de Ferri II, et relevait, on ne sait pourquoi, des comtes de Choiseul; on ignore aussi pourquoi Ferri III (1264), souverain d’Amance, relevait de comtes de Luxembourg.

On voit, par des titres de 1244, 45 et 49, que Geoffroy, seigneur d’Amance, était qualifié de Monseigneur par le duc de Lorraine. Dès le commencement du XIIIème siècle, il y avait, à quelque distance d’Amance, en la ville de Ste.-Marie-sous-Amance, une léproserie, hôpital de mazels ou lépreux, appartenant au duc de Lorraine. Selon D. Calmet, ce village de Ste.-Marie n’est autre que Laître-sous-Amance; selon d’autres archéologues, qui se fondent sans doute sur l’analogie des noms, c’est celui de Mazerules (mazels); mais l’éloignement de cette dernière commune nous semble donner peu de vraisemblance à cette supposition, d’autant plus qu’il existe très-près de Laître, un canton appelé encore aujourd’hui Corvée des malades. Ferri III, par lettres-patentes données à Troyes, en 1265, s’obligea d’entretenir les bourgeois d’Amance dans leurs franchises et coutumes, ainsi qu’en jouissaient ceux de Beaumont en Argonne.

Depuis cette époque, on voit la terre d’Amance, dont le château servit, en 1474, de résidence momentanée à Alphonse V, roi de Portugal, donnée en douaire à la duchesse Marguerite de Champagne, puis passer, en totalité ou seulement en partie, entre les mains de différents seigneurs, jusqu’en 1607, que Charles III la racheta à Othon, comte sauvage du Rhin et de Salm, seigneur de Fénétrange. Enfin, le duc Charles IV en fit don à la famille de Sureau, dont le chef, arrêté en Espagne, portant des dépêches de son souverain captif, préféra subir la question extraordinaire plutôt que de divulguer le secret de sa mission.

Le château d’Amance, dont les tours et les murailles dominaient la vallée, eut le sort de presque tous les châteaux qui couvraient le pays; il tomba sous la politique ombrageuse de Louis XIII et du cardinal ministre, et Louis XV en fit un village français.

Amance avait deux portes et une poterne; la porte, placée à l’ouest, dans la partie basse de la ville, se nommait la porte en bas; celle du côté de l’orient, dans la partie élevée de la ville, était désignée sous le nom de porte en haut. Ces dénominations se sont conservées et subsistent encore à présent dans le langage des habitants. Dans les commencements de la première révolution, les portes ont été démolies pour servir de matériaux à des constructions; elles avaient 15 pieds de Lorraine de voie, 8 à 9 pieds de largeur, de face de maçonnerie, et 42 pieds de hauteur.

La fondation de l’église est vulgairement attribuée à la comtesse Sophie de Bar; mais son architecture ne semble pas la faire remonter au-delà du XVe siècle. Il y a 67 ans que la tour, lézardée en beaucoup d’endroits, menaçait de s’écrouler. On la fit reconstruire, mais elle ne le fut pas à la même place que l’ancienne, et le nouveau clocher n’offre pas la même architecture. Les fonts baptismaux, malheureusement barbouillés en granit, sont en vasque et d’un bon style ornemental. Il y a, dans l’église, plusieurs chapelles fondées au XVIe siècle.

Le village actuel est plus grand, presque de moitié, que ne l’était la ville. Cette dernière ceignait seulement le monticule sur lequel était bâti le château, et ne renfermait qu’un petit nombre d’habitations: celles du gouverneur, des autorités, et cette riche chancellerie qui devint la proie des flammes, lors du siége de cette ville par les troupes de l’empereur, étaient, ainsi que le château, dans l’enceinte de la ville.

Il y a 60 ans environ que M. Chapé, avocat à Nancy, après avoir ascensé le tertre sur lequel s’élevait autrefois le château, en fit raser la crête et l’entoura, dans tout son circuit, de murs peu épais et faits à sec. Avant cela, on pouvait parcourir ce monticule dont la cime donne ouverture à un puits large et très bien fait, qui a dû servir à l’ancien château. Dans les divers travaux que ces mouvements de terrains occasionnèrent, on trouva une grande quantité de pièces de monnaie, qui furent vendues à des brocanteurs.

Les murs de la ville, construits par Mathieu II, et dont il reste quelques vestiges, avaient presque partout 2 m. 274 mil. d’épaisseur. Ces remparts ont encore conservé de solides fondements; toute la façade méridionale de la maison de M. Collenot, maire d’Amance, à l’obligeance duquel nous devons ces renseignements archéologiques, est placée sur leur ancienne base.

La maison d’Amance portait d’azur à l’écusson d’argent; ou l’écusson d’azur en cœur; le dernier seigneur de ce nom fut Jacques d’Amance, maréchal de Lorraine, qui vivait en 1399; cette maison se fondit dans celle de Bayon.

Au pied des murs de l’ancien château était une maison de campagne appelée Jumécourt, érigée en fief le 22 mai 1730. Cette maison, dont le propriétaire jouissait du droit de troupeau à part, existe encore, mais ne présente rien de remarquable.

Amance n’a guère conservé, de ses antiques souvenirs, que le nom d’une vigne, appelée Vigne des Deus ou des Ducs; il y a cependant quelques maisons où se voient des restes de sculptures, des écussons mutilés, des cheminées gothiques; entre autres, celle qui a été bâtie sur l’emplacement de la chapelle du château, et qui a conserve plusieurs vestiges de son ancienne destination.

Quoique nous ayons dit qu’aucun monument authentique ne peut faire remonter l’existence d’Amance jusqu’au temps de la domination romaine dans nos contrées, on découvre néanmoins, le long des versants nord-est et sud-est de la montagne sur laquelle ce bourg est construit, de nombreux débris qui attestent l’existence, dans ce lieu, d’habitations détruites, on ignore à quelle époque, et quantité de fragments de larges tuiles plates, à rebords, qui ont évidemment une origine romaine. On a découvert récemment, dans une vigne située à l’aspect du midi, une espèce d’auge régulièrement creusée dans un énorme bloc de pierre de Bouxières, et qui paraît avoir servi à un tombeau. Parmi les pierres et la terre dont elle était comblée, se trouvait un morceau de vase d’une pâte noirâtre mélangée de parcelles blanches, et très dure. A peu de distance, on a découvert aussi, à une faible profondeur du sol, un ~fragment considérable de ciment, dont la fabrication toute romaine ne peut être mise en doute. Ce fragment appartient à M. Collenot.

En extrayant le tombeau dont nous venons de parler, on a découvert trois pierres blanches vraiment énormes, qui lui servaient de base. Cette assise n’avait sans doute pas besoin de cette magnificence matérielle pour offrir à la pierre monumentale un appui qui la mît à l’abri de tout dérangement, et quand on considère la distance de 5 à 6 kilomètres qui existe des carrières de Bouxières, où elle a été prise, à cet endroit, le poids et la difficulté du transport par des chemins qui n’ont jamais cessé de présenter des descentes et des montées rapides, on peut reconnaître la pensée de rendre plus d’honneurs par plus de travaux aux restes qui furent déposés dans ce lieu, et que de tombeau a renfermé la dépouille mortelle d’un personnage considérable. A la surface supérieure du premier de ces blocs, on remarque une légère entaille en forme de X, dont l’une des branches, mieux creusée que l’autre, est terminée, à chacune de ses extrémités, par un trou carré d’environ 4 centimètres, et d’une profondeur égale à l’ouverture.

FLEURE-FONTAINE (Tillon)

Cense et belle maison de maître à 1 kilomètre d'Amance. le dénombrement de 1740 qualifie cette localité de cense et lui donne aussi le nom de Tillon; Durival n'en parle pas.

Laître-sous-Amance

Bouxières-aux-Chênes

Dommartin-sous-Amance

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